Plus et moins-values mobilières - Gains réalisés en 2014 : Réclamations

L'administration fiscale a intégré à sa doctrine les nouvelles modalités de détermination des plus-values mobilières préconisées fin 2015 et début 2016 par la jurisprudence, qui a censuré ses précédents commentaires sur l'application de l'abattement pour durée de détention, notamment en présence de pertes ou de compléments de prix. Pour les plus et moins-values imposées ou constatées en 2013 et 2014 en application des anciens principes, l'administration n'a pas modifié, spontanément, les calculs précédemment effectués. Les contribuables ont toutefois pu, formuler une réclamation afin de faire recalculer leurs gains et pertes conformément aux nouveaux principes, s'ils y avaient intérêt : pour ce faire ils avaient jusqu'au 31 décembre 2016 pour les gains 2013, et jusqu'au 31 décembre 2017 pour les gains 2014.

 Attention

En 2018, les contribuables ne peuvent plus formuler de réclamation en ce sens, le délai de recours ayant expiré le 31 décembre 2017.

Remise en cause de la doctrine

L'administration a modifié, le 4 mars 2016, sa doctrine administrative sur les plus-values mobilières afin de tirer les conséquences de décisions de justice condamnant sa doctrine sur le calcul des abattements pour durée de détention en matière de plus-values mobilières, et aboutissant à redéfinir les modalités d'imputation des moins-values.

Imputation des moins-values

Prenant acte de la décision du Conseil d'Etat du 12 novembre 2015, l'administration fiscale a supprimé toutes références, dans sa doctrine, à l'application des abattements pour durée de détention sur les moins-values mobilières et redéfini les modalités d'imputation de ces pertes.

Ainsi, les moins-values ne sont plus diminuées de l'abattement pour durée de détention.

La moins-value subie au cours d'une année, ou d'une année antérieure, s'impute sur les plus-values imposables retenues avant application, le cas échéant, des abattements pour durée de détention et de l'abattement fixe de 500 000 € applicable aux dirigeants de PME partant à la retraite.

Le contribuable a la faculté de répartir l'imputation de cette moins-value sur une ou plusieurs plus-values imposables de son choix et pour le montant de son choix.

Lorsque le résultat de cette imputation génère :

un solde positif (plus-value), ce solde est, le cas échéant, réduit des abattements pour durée de détention ;

un solde négatif (moins-value), l'abattement pour durée de détention n'est pas applicable et ce solde est imputable pour son montant brut sur les plus-values de même nature réalisées au cours des 10 années suivantes.

 

Compléments de prix

Le 2nd changement de position, induit par une décision rendue le 14 janvier dernier par le Conseil constitutionnel, concerne les modalités de calcul de l'abattement pour durée de détention sur les compléments de prix.

Pour les compléments de prix reçus en 2013 et 2014, l'administration fiscale refusait d'appliquer l'abattement pour durée de détention si le gain réalisé lors de la cession (auquel se rattache le complément de prix) n'en avait pas bénéficié. Elle interprétait donc strictement le principe selon lequel les compléments de prix reçus par le cédant en exécution d'une clause d'indexation sont réduits de l'abattement pour durée de détention appliqué lors de la cession considérée.

Pour l'imposition des gains réalisés à compter de 2015, elle a assoupli sa position et applique désormais au complément de prix l'abattement qui aurait dû être appliqué au gain principal compte tenu de la durée de détention des titres cédés. Ainsi, se retrouvent éligibles à l'abattement, alors qu'ils en étaient auparavant exclus, les compléments afférents à des cessions :

qui n'ont pas généré de plus-value imposable permettant l'application d'un abattement pour durée de détention (cession ayant dégagé une moins-value, ou une plus-value qui a été compensée en totalité par une moins-value de même nature) ;

réalisées avant le 1er janvier 2013 (avant l'entrée en vigueur de l'abattement pour durée de détention).

Effectuer une réclamation

Dans quel cas ?

Si les contribuables avaient toujours intérêt à effectuer une réclamation pour voir appliquer l'abattement pour durée de détention aux compléments de prix qui en ont été privés à tort en 2013 et 2014 en application de la doctrine révoquée (l'application de l'abattement conduisant toujours à réduire un gain taxable), il en allait différemment en présence de moins-values abattues à tort.

Les nouvelles règles adoptées par l'administration n'étaient pas toujours avantageuses pour les contribuables ayant réalisé en 2013 et 2014 des plus et moins-values simultanément ou ayant réalisé uniquement des plus-values sur lesquelles ils ont imputé des moins-values antérieures

Réalisation de moins-values uniquement - Réclamation

Les contribuables n'ayant réalisé, au titre de 2013 ou au titre de 2014, que des moins-values avaient intérêt à effectuer une réclamation si celles-ci ont été diminuées de l'abattement pour durée de détention : la réclamation aboutissait à gonfler le montant de la perte reportable.

Réalisation de plus-values uniquement (sans imputation de moins-values)

Les contribuables ayant réalisé, au titre de 2013 ou au titre de 2014, uniquement des plus-values n'avaient pas intérêt à effectuer cette réclamation, sauf s'ils avaient reçu un complément de prix privé à tort de l'abattement.

Réalisation de plus-values et imputation de moins-values (de l'année ou antérieure)

L'opportunité d'effectuer une réclamation lorsque le contribuable a, au titre de 2013 et/ou 2014, réalisé des plus et moins-values, ou a réalisé uniquement des plus-values, mais a imputé sur celles-ci des pertes antérieures, dépendait des circonstances.

Le contribuable devait effectuer des simulations afin de savoir si l'application des nouvelles règles lui était réellement plus favorable ou au contraire défavorable :

dans le cas d'un contribuable ayant réalisé uniquement des plus-values, mais imputant sur ces gains des pertes antérieures : les pertes antérieures devant s'imputer, selon les nouvelles règles avant calcul de l'abattement, les moins-values antérieures risquaient d'être plus rapidement absorbées, car elles s'imputaient sur un gain non "abattu",

de la même façon, en cas de réalisation au cours d'une même année de pertes et de gains, la compensation avant abattement pouvait avoir pour effet d'épuiser plus rapidement les pertes à imputer, si les gains bénéficiaient d'abattements.

Les 2 exemples ci dessous illustrent ces propos.

 Exemple

Réalisation de plus-value et imputation de pertes antérieures

Patrick a réalisé en 2013 une plus-value taxable de 100 000 € bénéficiant d'un abattement de 50 % et dispose d'une moins-value imputable constatée en 2010 de 60 000 €.

Lors du calcul de l'impôt en 2013, l'administration fiscale a d'abord appliqué l'abattement sur la plus-value avant d'imputer la moins-value :

plus-value taxable en 2013 : 100 000 € - (100 000 € x 50 %) = 50 000 €

imputation de la moins-value antérieure  : - 60 000 €

résultat 2014 : perte reportable - 10 000 € (solde de la moins-value 2010 non imputée)

Calcul avec les nouvelles règles

Patrick n'avait aucun intérêt à effectuer une réclamation dans ce cas, car, en application des nouvelles règles, sa perte antérieure ne suffisait pas à compenser son gain : l'administration fiscale aurait commencé, en effet, par imputer la moins-value antérieure sur la plus-value brute avant abattement :

plus-value taxable en 2013 : 100 000 €

imputation de la moins-value : - 60 000 €

gain taxable avant abattement : 40 000 €

gain après abattement :40 000 € - (40 000 € x 50 %) = 20 000 €

Gain taxable : 20 000 €

Réalisation de plus-value et de moins-values

Patrick a réalisé en 2014 une plus-value taxable de 20 000 € ne bénéficiant d'un abattement de 85 % et une moins-value de 20 000 € également bénéficiant d'un abattement mais de 50 %.

Lors du calcul de l'impôt en 2014, l'administration fiscale a d'abord appliqué l'abattement sur la plus-value et la moins-value avant de les compenser :

plus-value après abattement : 20 000 € - (20 000 € x 80 %) = 4 000 €

moins-value après abattement : 20 000 € - (20 000 € x 50 %) = 10 000 €

résultat 2014 : perte reportable 4 000 - 10 000 € = - 6 000 €

Calcul avec les nouvelles règles

Patrick n'avait aucun intérêt à effectuer une réclamation dans ce cas, car, en application des nouvelles règles, la compensation se serait faite avant application des abattements : le gain et la perte se seraient compensées, mais il aurait perdu la moins-value reportable :

plus-value 2014 avant abattement 20 000 €

imputation de la moins-value 2014 avant abattement : - 20 000 €

résultat de la compensation : 0 €

Comment ?

Les réclamations devaient être faites auprès du SIP du contribuable, au plus tard le 31 décembre de la 2ème année suivant celle de la mise en recouvrement du rôle, c'est-à-dire :

le 31 décembre 2016 au plus tard pour les gains réalisés en 2013,

et jusqu'au 31 décembre 2017 pour ceux réalisés en 2014.

 

Toute réclamation doit comporter les éléments suivants :

les nom, prénom et adresse du réclamant,

les impôts, droits ou taxes contestés,

l'exposé sommaire des moyens par lesquels son auteur prétend la justifier,

l'objet réel et la portée exacte de la demande (base, montant du dégrèvement ou du remboursement de crédit de taxe sollicité).

Les réclamations doivent être accompagnées des pièces suivantes :

avis d'imposition ou copie de l'avis d'imposition ou extrait de rôle, lorsqu'il s'agit d'un impôt direct établi par voie de rôle ;

avis de mise en recouvrement ou copie de cet avis pour les impôts, droits ou taxes ayant donné lieu à la notification d'un tel avis ;

pièce justifiant le montant de la retenue ou du paiement lorsque la demande concerne des impôts perçus par voie de retenue à la source ou versés spontanément, sans émission préalable d'un rôle ou d'un avis de mise en recouvrement.

Enfin, la réclamation doit porter la signature manuscrite du contribuable ou de son mandataire.