Loi de finances pour 2018 - Impôt sur la fortune immobilière (IFI)
Modalités particulières de détention, règles d'évaluation et décotes
La loi de finances pour 2018 supprime l'ISF et le remplace par un nouvel impôt sur le patrimoine, l'impôt sur la fortune immobilière (IFI). Comme l’ISF, l’IFI pèse sur la capacité contributive liée à la détention d’un patrimoine, mais contrairement à l’ISF, cette capacité contributive est, dans le cadre de l’IFI, assise sur la détention des seuls biens immobiliers. Les placements financiers (sauf exceptions) et, de manière plus générale, tous les biens mobiliers, sont exclus de sa base de calcul. L'IFI se distingue d'ailleurs de son prédécesseur, pour l'essentiel, par cette seule caractéristique (le seuil d'imposition, le barème, le mécanisme du plafonnement, etc., de l'ISF sont repris à l'identique pour l'IFI, sous réserve de l'adaptation de certaines règles, notamment relatives au passif et aux biens exonérés, induites par la restriction de son champ d'application à l'immobilier). Aussi, plusieurs dispositifs ISF, pour la plupart liés à la souscription ou à la détention de valeurs mobilières, ne sont pas transposés au nouvel IFI (exonération des titres de certaines PME, exonération partielle des titres soumis à un pacte Dutreil ou des titres détenus par les salariés et les mandataires sociaux, réduction au titre des souscriptions de parts de PME).
L'IFI entre en application dès le 1er janvier 2018.
Seuil d'imposition
L'IFI est, comme l'ISF, dû par les foyers dont la valeur du patrimoine taxable est supérieure à 1 300 000 € au 1er janvier de chaque année d'imposition (l'IFI est donc également annuel).
Principes d'imposition
Redevables
La loi ne modifie pas le champ des redevables de l’ISF. Sont donc soumis à l’IFI :
les résidents fiscaux français, à raison de leurs actifs situés en France ou hors de France,
les non-résidents, à raison uniquement de leurs biens situés en France (y compris, précise le texte, sur la fraction des parts ou actions de sociétés situées en France ou hors de France, représentatives de biens ou de droits immobiliers situés en France).
La loi maintient le régime des impatriés, selon lequel les personnes qui n’ont pas été domiciliées fiscalement en France pendant les 5 dernières années ne sont soumises à l'IFI, pendant les 5 années suivant leur impatriation, qu’à raison de leurs biens immobiliers situés à l’étranger.
Enfin, il est à noter que la transformation de l’ISF en IFI ne devrait pas emporter de conséquence sur l’application des conventions fiscales internationales, les dispositions applicables à l'ISF devant, en principe, pouvoir s'appliquer à l'IFI.
Foyer fiscal
La détermination du patrimoine immobilier à prendre en considération reste établie en fonction de la situation familiale du redevable au 1er janvier de l'année d'imposition. Il est ainsi tenu compte, le cas échéant, du patrimoine du conjoint, du partenaire de PACS, du concubin notoire, ainsi que de celui de leurs enfants mineurs lorsqu'ils en ont l'administration légale des biens.
Biens imposables
Seuls les actifs immobiliers sont soumis à l'IFI (sauf exonération spécifique, notamment pour les biens immobiliers professionnels).
Les autres biens, qui étaient jusqu'alors imposés à l'ISF, ne sont plus pris en compte dans les bases de calcul de l'IFI. Il s'agit, notamment, des liquidités (espèces, comptes courants, livrets d'épargne, etc.), des bons, des obligations, des créances, de la valeur de capitalisation des rentes viagères, des meubles, des véhicules, des bijoux, des métaux précieux, des objets et œuvres d'arts, etc.
Pour le calcul de l'IFI, il faut tenir compte des biens et droits immobiliers :
détenus directement par le foyer (en pleine propriété, en indivision, en démembrement, etc.) ;
détenus indirectement par les membres du foyer, c'est-à-dire qu'est retenue, pour le calcul de l'IFI, la fraction de la valeur des parts et des actions de société correspondant à des actifs immobiliers non affectés à l'activité de la société (biens ou droits immobiliers logés dans des SCPI ou des OPCI, que ces actifs soient ou non logés dans des produits type assurance vie, biens dont le redevable se réserve la jouissance, etc.).
Exemple
Patrick détient 100 actions, valorisées 60 000 €, d'une société dont l'actif est placé à 25 % dans l'immobilier. Patrick devra déclarer 15 000 € au titre de son IFI 2018 (25 % de 60 000 €).
Le texte précise, cependant, à ce dernier égard, que ne sont pas prises en compte les parts ou actions de sociétés ou d’organismes qui ont une activité opérationnelle (industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale), c'est-à-dire effective, dès lors que le redevable détient, soit directement, soit indirectement avec les personnes de son foyer, moins de 10 % du capital et des droits de vote de la société. Il précise également que les sociétés qui, outre la gestion d’un portefeuille de participations, participent activement à la conduite de la politique de leur groupe et au contrôle de leurs filiales et rendent, le cas échéant et à titre purement interne, des services spécifiques, administratifs, juridiques, comptables, financiers et immobiliers, sont, comme pour l'ISF (notion de holding animatrice), considérées comme des sociétés commerciales (avec toutes les conséquences que cela implique : imposition à l'IFI à hauteur de la fraction de la valeur des titres correspondant à des droits immobiliers, sauf en deçà du seuil de 10 % de participation).
En revanche, les contribuables détenant des parts ou actions dans des sociétés ayant une activité financière ou dans des sociétés ayant une activité de gestion de leur propre patrimoine immobilier doivent donc les déclarer à l'IFI pour la fraction de leur valeur investie en immobilier quand bien même leur niveau de participation serait inférieur à ce seuil.
Note
Il est à craindre, en pratique, que ce seuil conduise à des restructurations patrimoniales visant à échapper à l’IFI, en répartissant les investissements dans plusieurs entreprises immobilières, en considération de ce seuil d’exonération de 10 %.
A titre d'exception, les immeubles détenus par l'intermédiaire d'un organisme de placement collectif (OPC, fonds d'épargne salariale, sociétés d'investissements à capital fixe, etc.) peuvent être exclus de la base de calcul de l'IFI sous réserve que l'actif de cet organisme soit composé, directement ou indirectement, à hauteur d'au moins 20 % de biens ou droits immobiliers entrant normalement dans l'assiette de calcul de l'IFI, et que le redevable et son foyer IFI détiennent moins 10 % des droits du fonds ou de l'organisme. Il en va de même pour les sociétés d'investissements immobiliers cotées (SIIC), sous condition que le contribuable et son foyer IFI détiennent moins de 5 % du capital et des droits de vote de la société.
La clause de bonne foi, selon laquelle aucun rehaussement d’IFI n'est effectué si le redevable démontre de bonne foi qu’il n’avait pas les informations nécessaires à l’estimation des biens soumis à l’IFI qu’il détenait, est reprise du dispositif ISF (mais qui ne s'appliquait qu'au titre des biens professionnels), de même que sa limite, à savoir que cette clause de bonne foi ne s’applique pas si le redevable contrôle directement ou indirectement la chaîne de participations à travers laquelle il détient ces biens immobiliers, ou si l’une des personnes du foyer se réserve la jouissance de ces biens ou si le redevable détient directement ou indirectement, seul ou conjointement avec les membres de son foyer IFI, plus de 10 % du capital ou des droits de vote de la société ou de l'organisme qui détient directement les biens ou droits immobiliers imposables.
Attention
L'activité de location de locaux d’habitation loués meublés, ou destinés à être loués meublés, n'est pas considérée comme une activité commerciale. Ces biens ne sont donc exonérés que si le redevable exerce dans la société une fonction qui lui permet de bénéficier du régime des biens professionnels.
Modalités particulières de détention, règles d'évaluation et décotes
La loi reprend en grande partie le droit existant en le transposant aux actifs immobiliers visés par l’IFI :
prise en compte des biens immobiliers grevés d’un usufruit ou d'un droit d'usage personnel dans le patrimoine de l'usufruitier pour sa valeur en pleine propriété, sauf exceptions, auxquels cas ils sont répartis dans les patrimoines de l'usufruitier ou du nu-propriétaire, suivant les proportions prévues par le barème fiscal en fonction de l'âge de l'usufruitier ;
la valeur de rachat des contrats d’assurance vie rachetables et des bons et contrats de capitalisation exprimés en unités de compte est incluse dans le patrimoine du souscripteur à hauteur de la fraction de leur valeur représentative d’actifs immobiliers (les primes versées après l’âge de 70 ans sur des contrats d'assurance vie non rachetables, lesquelles étaient imposables à l'ISF, ne le sont donc plus dans le cadre de l'IFI) ;
les actifs immobiliers transférés dans une fiducie ou un trust sont compris dans le patrimoine du constituant pour leur valeur vénale nette (pas de changement par rapport à l'ISF, excepté le recentrage sur l'immobilier) ;
l'évaluation des biens doit être effectuée suivant les règles applicables aux droits de mutation par décès (comme pour l'ISF) ;
l'abattement de 30 % sur la résidence principale est maintenu.
Elle prévoit, en outre, une disposition qui n’existait pas dans le cadre de l’ISF, à savoir la prise en compte, dans l’IFI, de la valeur des actifs immobiliers faisant l'objet d'un contrat de location-accession à la propriété immobilière et au crédit-bail immobilier, sous déduction du montant des loyers et de l’option d’achat restant à courir jusqu’à l’expiration du bail. Enfin, des modalités d'imposition spécifique sont prévues pour les biens détenus en vertu d'un pacte tontinier, précisant qu'ils doivent être inclus dans le patrimoine de chacun des contractants au prorata des sommes investies par chacun des survivants dans le contrat.
Note
Les autres décotes jusqu'alors admises par l'administration et la jurisprudence en matière d'ISF n'ont pas été intégrées au texte, mais il est fort probable que l'administration fiscale les transpose à l'IFI (biens loués, biens détenus en indivision, etc.). Celles qui seraient devenues sans objet du fait du passage à l'IFI devraient logiquement être écartées.
Biens exonérés
Outre les biens qui ne sont pas soumis à l'IFI du fait de la restriction de son champ d'application aux seuls actifs immobiliers, certains biens, qui devraient normalement y entrer, ont été expressément exonérés par la loi. Il s'agit, ici encore, d'une reprise des dispositifs d'exonération partielle et totale existants en matière d'ISF, sous réserve de certaines adaptations liées à la nature immobilière des actifs, à savoir, ceux prévus en faveur :
des biens (immobiliers) professionnels (biens nécessaires à l'activité détenus directement par le redevable, par le biais d’une société de personnes soumise à l’IR ou à l'IS, y compris via une holding animatrice) ;
des biens loués sous le régime de la location meublée professionnelle (LMP) ;
des bois et forêts ;
des parts de groupements forestiers ;
et enfin, des biens ruraux loués à long terme et des parts de GFA et de GAF.
En revanche, un certain nombre de dispositifs, qui auraient pu permettre d'exonérer la fraction immobilière imposable de certains droits sociaux, sont supprimés :
l'exonération sous conditions des titres de PME et des parts de FIP, FCPI et FCPR ;
l'exonération partielle des titres sous engagement Dutreil ;
l'exonération des titres détenus par les actionnaires salariés et mandataires sociaux.
Passif
Il est toujours possible d'inscrire certaines dettes au passif de l'IFI, mais uniquement celles relatives à des biens ou des droits immobiliers, et ce sous la même réserve que celle applicable à l'ISF, à savoir que ces dernières soient rattachées à des biens soumis à l'IFI. Sont au principal concernés :
les dettes liées à des dépenses de réparation ou d’entretien supportées par le propriétaire (y compris celles qu'il aurait supportées pour le compte du locataire et dont il n'aurait pu obtenir le remboursement au 31 décembre de l'année du départ du locataire),
les emprunts contractés pour l'acquisition de biens ou de droits immobiliers (et pour l'acquisition de parts ou d'actions de société, mais seulement au prorata de la valeur des titres représentatifs d'actifs immobiliers),
les emprunts souscrits pour réaliser des travaux de construction, de reconstruction, d'amélioration ou d'agrandissement.
Par ailleurs, les contribuables ont toujours la possibilité de déduire leurs dettes d'impôts, mais ce, de manière beaucoup plus restrictive, puisqu'elle ne concerne -également- plus que les impôts relatifs aux biens immobiliers (taxe foncière, taxe sur les logements vacants, etc.), autres que celles incombant normalement à l'occupant (notamment la taxe d'habitation, qui n'est donc pas prise en compte au titre du passif) et celles relatives à l'imposition des revenus immobiliers (l'impôt sur les revenus fonciers, comme l'impôt sur les plus-values immobilières, ne sont donc pas déductibles).
Ce mécanisme de déduction est cependant encadré pour limiter les potentiels abus :
seule une part des dettes résultant d'un emprunt in fine (montant total de l'emprunt diminué d'une somme égale à ce même montant multiplié par le nombre d'années écoulées depuis le versement du prêt et divisé par le nombre d'années total de l'emprunt) ou d'un emprunt sans terme fixe (montant total du prêt après déduction d'1/20ème par année écoulée depuis le versement du prêt) peut être inscrite chaque année au passif de l'IFI ;
les dettes contractées auprès du redevable et les dettes contractées auprès d’un proche (sauf si le redevable peut justifier, selon le cas, que le prêt n'a pas été contracté dans un objectif principalement fiscal, ou de conditions normales du prêt : échéances, remboursement..) ne peuvent pas être déduites ;
les prêts familiaux et les emprunts contractés auprès d'une société contrôlée par un membre du groupe familial ne sont pas déductibles.
Enfin, l'imputation de dettes au passif est plafonnée. Il est en effet prévu que, dans l'hypothèse où la valeur du patrimoine taxable excède 5 millions d’euros, le montant des dettes potentiellement déductibles excédant 60 % de cette valeur n'est admis en déduction qu'à hauteur de 50 % sauf si le contribuable peut justifier que ces dettes n'ont pas été contractées dans un objectif principalement fiscal…).
Note
Au regard du rapport de la commission des finances sur le projet de loi de finances pour 2018, le seuil de 5 millions d’euros devrait s’entendre de la valeur brute des biens immobiliers avant déduction des dettes admises au passif de l'IFI.
Barème d'imposition
Le barème rester inchangé par rapport à l'ISF, y compris la taxation dès 800 000 € dès lors que le seuil d'assujettissement de 1 300 000 € a été atteint et la décote applicable aux redevables proches du seuil d'imposition.
Fraction de valeur nette taxable du patrimoine au 1er janvier de l'année d'imposition |
Taux |
|
Comprise entre |
800 000 € et 1 300 000 € |
0,5 % |
Comprise entre |
1 300 001 € et 2 570 000 € |
0,7 % |
Comprise entre |
2 570 001 € et 5 000 000 € |
1 % |
Comprise entre |
5 000 001 € et 10 000 000 € |
1,25 % |
Supérieure à |
10 000 000 € |
1,5 % |
Réduction(s) d'impôt
La réduction de 75 % obtenue en contrepartie des dons réalisés au profit de certains organismes est reprise, dans son intégralité, pour l'IFI (elle est toujours applicable dans la limite de 50 000 €, la période de collecte est maintenue sur l'entre 2 déclarations et non sur l'année civile comme le prévoyait le projet initial, etc).
Note
La liste des 10 catégories de structures ayant un but d’intérêt général qui pourront bénéficier du nouveau dispositif sont strictement les mêmes que celles bénéficiant de l’ISF-dons.
Il n'est, en revanche, plus possible de bénéficier de réduction d'impôt en cas d'investissement dans une PME ou dans des parts de FIP ou de FCPI. Un dispositif transitoire exceptionnel a toutefois été mis en place pour permettre aux personnes ayant réalisé de tels investissements entre la date de leur dernière déclaration ISF et le 31 décembre 2017 de les imputer sur leur IFI 2018.
Déduction des impôts étrangers équivalents
Le montant des impôts équivalent à l'IFI payés à l'étranger peut être déduit de l'IFI, à l'image de ce que les impôts équivalents à l'ISF étaient admis en déduction de l'ISF, mais ajusté aux seuls actifs immobiliers. Ce dispositif n'est susceptible de jouer qu’à raison de l’obligation fiscale illimitée des résidents fiscaux, imposables en France à raison de leurs biens situés à l’étranger. La notion d’impôt équivalent à l’impôt sur la fortune immobilière reste toutefois relativement floue : si l’ISF a peu d’équivalents à l’étranger, l’IFI, en tant qu’impôt immobilier, pourrait en revanche être rapproché de certains impôts locaux existant à l’étranger (par exemple, le canton de Genève, en Suisse, applique un impôt immobilier dit complémentaire de 0,1 % de la valeur fiscale de ce bien... sa faculté d’imputation sur l’IFI reste toutefois incertaine...).
Plafonnement
Le mécanisme du plafonnement est préservé (mêmes modalités de calcul, même taux, soit à hauteur de 75 % des revenus).
Déclaration et le paiement
S'agissant enfin des modalités déclaratives de ce futur IFI, le formulaire n° 2725 (qui ne s'appliquait déjà plus qu'aux foyers déclarant au moins 2 570 000 €) est supprimé. Les contribuables concernés doivent déclarer la valeur brute et la valeur nette taxable de leurs actifs immobiliers dans leur déclaration annuelle de revenu n° 2042 (et, en conséquence, suivant le même calendrier) et y joindre des annexes spécifiques.
L’IFI sera recouvré dans les mêmes conditions et suivant les mêmes modalités que l’IR.
Note
Compte tenu du fait que les non-résidents fiscaux, imposables à l’IFI sur leurs biens situés en France, ne remplissent pas de déclaration de revenus, ils resteront soumis à l’obligation de remplir une déclaration spéciale dont la date limite de dépôt n’a pas été fixée par la loi.
Pour en savoir plus...
Autres mesures de la loi de finances pour 2018