Loi de finances rectificative pour 2015 - Fiscalité des entreprises
Bénéfices agricoles - Remplacement du forfait par un nouveau régime micro
La loi de finances rectificative remplace le régime du forfait agricole par un régime de " micro-bénéfices agricoles" ou "micro-BA" à compter de l'imposition des revenus perçus en 2016.
Actuellement, les exploitants agricoles ayant une moyenne de recettes mesurée sur 2 années consécutives qui n’excède pas 76 300 € sont imposés selon une évaluation forfaitaire de leur bénéfice.
Dans un objectif de simplification et d’harmonisation de l’imposition des petites entreprises, l’imposition selon un forfait (régime particulier propre aux BA et obsolète) est remplacée par un régime d’imposition "micro-BA", avec des aménagements afin de tenir compte de la spécificité de l’activité agricole et notamment de la variabilité des revenus agricoles.
Contribuables concernés
Le nouveau régime des micro-BA s'appliquera, à compter de l'imposition des revenus perçus en 2016, aux contribuables dont la moyenne des recettes sur 3 ans (3 années précédant l'année d'imposition, c'est-à-dire N-3, N-2 et N-1) n'excède pas 82 200 € (au lieu de 76 300 € sur une moyenne biennale actuellement pour le forfait).
Les contribuables imposables selon le régime du bénéfice réel pour des bénéfices ne provenant pas de leur exploitation agricole sont exclus de ce régime.
Note
Cette limite sera revalorisée tous les 3 ans, à compter de 2017, dans la même proportion que l'évolution triennale de la limite supérieure de la 1ère tranche du barème.
Calcul du bénéfice imposable
Dans le cadre de ce régime, le bénéfice imposable sera égal à la moyenne des recettes de l’année d’imposition et des 2 années précédentes, diminuée d’un abattement de 87 %.
Cet abattement ne peut être inférieur à 305 €.
Il est réputé tenir compte des amortissements pratiqués selon le mode linéaire.
Les recettes à retenir s’entendent des sommes encaissées au cours de l’année civile dans le cadre de l’exploitation, augmentées de la valeur des produits prélevés dans l’exploitation et alloués soit au personnel salarié, soit au propriétaire du fonds en paiement du fermage, et à l’exclusion de celles encaissées au titre des cessions portant sur les éléments de l’actif immobilisé, des remboursements de charges engagées dans le cadre de l’entraide agricole, des subventions et primes d’équipement et des redevances ayant leur origine dans le droit de propriété.
En cas de création d’activité, le montant des recettes à prendre en compte est égal, pour l’année de la création, aux recettes de ladite année et pour l’année suivante, à la moyenne des recettes de l’année d’imposition et de l’année précédente.
Les plus ou moins-values résultant de cessions portant sur les éléments de l’actif immobilisé sont déterminées et imposées dans les conditions du régime réel d’imposition.
Régime transitoire 2016 et 2017
Exceptionnellement au titre des années 2016 et 2017, le législateur a prévu des modalités particulières de détermination du bénéfice imposable afin de tenir compte du fait que les exploitants n'étaient pas contraints de tenir un suivi de leurs recettes en 2014 et 2015, exercices au cours desquels leur bénéficie imposable a été déterminé forfaitairement grâce à l'application de barème. Ainsi, le bénéfice imposable, avant prise en compte des plus ou moins-values provenant de la cession des biens affectés à l’exploitation, est égal, respectivement :
à la moyenne des bénéfices forfaitaires agricoles de 2014 et de 2015 et des recettes de 2016 diminuées d’un abattement de 87 % ;
à la moyenne du bénéfice forfaitaire agricole de 2015 et des recettes de 2016 et de 2017 diminuées d’un abattement de 87 %.
Obligations déclaratives
Les contribuables portent directement sur la déclaration d'ensemble des revenus le montant des recettes de l’année d’imposition, des recettes des 2 années précédentes et des plus ou moins-values réalisées ou subies au cours de l’année.
Ils tiennent et, sur demande du service des impôts, présentent un document donnant le détail journalier de leurs recettes professionnelles, ainsi que les factures et toute autre pièce justificative de ces recettes.
Option pour le régime réel
Les contribuables soumis de plein droit au régime micro-BA peuvent opter pour le régime réel.
Cette option est valable 2 ans et est reconduite tacitement par périodes de 2 ans.
Les contribuables qui désirent renoncer à leur option pour un régime réel d’imposition doivent notifier leur choix à l’administration avant le 1er février de l’année suivant la période pour laquelle l’option a été exercée ou reconduite tacitement.
OGA - Renforcement des missions et rétablissement des avantages fiscaux
Renforcement de la mission des OGA
La loi renforce les missions des OGA en améliorant leurs outils pour veiller à la régularité des déclarations fiscales soumises à leur contrôle.
Chaque adhérent sera désormais soumis à un examen périodique de sincérité (à une fréquence pluriannuelle) reposant sur l'examen, par échantillon, de pièces justificatives, notamment pour s’assurer de la déductibilité de certaines charges déduites du résultat. La majoration de 25 % sera applicable aux revenus et charges des contribuables qui auraient été exclus d’un OGA au cours de l’année d’imposition pour ne pas avoir respecté certaines de leurs obligations.
Le champ de compétence des OGA est étendu, au-delà de la TVA et des déclarations de résultat, aux déclarations de CVAE et revenus encaissés à l'étranger. Ce faisant la loi met le droit français en conformité avec le droit européen, concernant le traitement par les OGA des revenus de source étrangère, en autorisant les OGA français à examiner les revenus de source étrangère et en permettant à des certificateurs étrangers, établis dans l’Union européenne ou l’Espace économique européen, de le faire également .
La loi renforce également les règles d’indépendance des OGA et met en cohérence leurs obligations et celles des professionnels de l’expertise-comptable autorisés à délivrer un "visa fiscal", dont les missions sont largement similaires.
Enfin, l’obligation qui incombe aux adhérents des OGA d’accepter les règlements par chèque est modernisée, grâce à l'adjonction de la possibilité d’accepter le paiement par carte bancaire.
Rétablissement des avantages fiscaux
La loi rétablit, en les aménageant, plusieurs avantages fiscaux en faveur des adhérents d'OGA, dont la loi de finances pour 2015 a prévu la suppression à compter de l'imposition des revenus perçus en 2016, afin de conserver une incitation forte à adhérer aux OGA dont les missions sont renforcées. Il s'agit de :
la réduction d’impôt pour frais de comptabilité et d’adhésion à un organisme de gestion agréé. Celle-ci ne sera en revanche plus égale au montant total des dépenses supportées pour la tenue de comptabilité ou pour adhésion à une OGA mais aux 2/3 de ce montant (toujours dans la limite de 915 € par an) ;
la déduction dérogatoire du salaire du conjoint .
La loi rétablit également à 17 500 € (au lieu de 13 800 €) la limite de déduction du salaire du conjoint pour les contribuables n'adhérant pas à un OGA.
Dispense de majoration de 25 %
La loi étend la dispense de majoration de 25 % aux adhérents d'organismes mixtes agréés (OMG), que la loi met en place, ainsi qu'à ceux recourant à une succursale d'expertise comptable à compter du 1er janvier 2016.
Enfin, la loi prévoit de nouvelles exclusions à ces cas de dispense de majoration de 25 %. Ainsi, sont exclus de cette dispense, les contribuables qui ont été exclus d'un de ces organismes au cours de l'année d'imposition (ou dont la lettre de mission a été résiliée pour les contribuables recourant à un professionnel de l'expertise comptable) pour ne pas avoir fourni de réponse suffisante aux demandes de justification de l'un de ces organismes dans le cadre de ses missions ou pour n'avoir pas donné suite à la demande de l'un de ces organismes de rectifier une déclaration fiscale ou à la suite d'une procédure d'exclusion de l'adhérent.
ZRR - Réforme des zones de revitalisation rurale
Les entreprises qui sont créées ou reprises jusqu'au 31 décembre 2015 dans les zones de revitalisation rurale (ZRR) peuvent bénéficier d'une exonération d'IR (ou d'IS) à raison des bénéfices réalisés jusqu'au terme du 59ème mois suivant celui de leur création ou de leur reprise (suivi d'un abattement dégressif pendant 3 ans (75 %, 50 % puis 25 %).
La loi proroge jusqu’en 2020 ce dispositif d’exonération temporaire d’impôt sur les bénéfices et, par conséquent, les exonérations de cotisation foncière des entreprises (CFE) et de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) qui lui sont liées.
D'autre part, elle l'aménage sur 2 points :
dès le 1er janvier 2016, en excluant du bénéfice de l'exonération les créations et reprises d'activités dans les ZRR consécutives au transfert, à la concentration ou à la restructuration d'activités précédemment exercées dans ces zones, sauf pour la durée restant à courir si l'activité reprise ou transférée bénéficie ou a bénéficié de cette exonération. Cette nouvelle clause anti-abus est destinée à décourager des pratiques de "nomadisme fiscal" qui consisteraient à délocaliser une activité dans une autre commune classée ZRR afin de profiter des avantages fiscaux ;
en instaurant, à compter du 1er juillet 2017, une nouvelle définition des communes classées en zones de revitalisation rurale (ZRR) sur la base de 2 critères :
la densité de population de l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI),
et la richesse des habitants.
Le classement des communes en ZRR actuellement en vigueur demeure applicable jusqu’au 30 juin 2017.
Le classement en zone de revitalisation rurale d’anciennes communes devenues communes déléguées d’une commune nouvelle au 1er janvier 2016 ou au 1er janvier 2017 demeure également applicable jusqu’au 30 juin 2017. Bien entendu, dans l'hypothèse où, à compter de cette date, la commune d'implantation d'une entreprise sortirait de la liste des communes classées en ZRR, les exonérations en cours dont bénéficiait cette entreprise restent applicables pour la durée restant à courir.
Le classement devrait être révisé tous les 6 ans, au 1er janvier de l'année qui suit le renouvellement général des conseils communautaires.
Note
D'après le rapport parlementaire établi à l'occasion de la 1ère lecture du projet de loi à l'Assemblée nationale, sur les 14 691 communes actuellement classées en ZRR, 4 000 communes sortiraient du classement et 3 000 y entreraient.
Régime des sociétés mère fille
La loi de finances rectificative pour 2015 prévoit plusieurs mesures afin d'aménager les régimes fiscaux des groupes de société, notamment afin de les mettre en conformité avec le droit européen et de prendre en compte les censures du Conseil constitutionnel.
Conditions d'application
Note
Le régime des sociétés mères et filiales concernait 43 700 entreprises en 2014 et représente un coût d’environ 23 milliards d’euros par an.
Le régime des sociétés mères et filiales exonère d’impôt sur les sociétés (hormis à hauteur d’une quote-part de frais et charges) les dividendes reçus par une société d’une filiale. Cette exonération a pour objet d’éviter de multiplier les taxations du résultat de la filiale lorsqu’il existe différents niveaux d’interposition.
Pour être éligible à ce régime les structures mères doivent détenir au moins 5 % du capital des sociétés filles. Ce taux de 5 % du capital de la société émettrice est particulièrement élevé dans le cas de grandes entreprises, notamment les sociétés du CAC 40.
C’est pourquoi, la loi élargit le champ d’application du régime mère-fille aux sociétés contrôlées par des organismes à but non lucratif qui détiennent une participation de 2,5 % du capital et 5 % des droits de vote d’une filiale, avec un engagement de conserver les titres pendant au minimum 5 ans (au lieu de 2 ans en principe).
Par ailleurs la loi prévoit plusieurs autres aménagements :
elle prévoit de retenir, pour l'appréciation de ce pourcentage de détention, non plus seulement les titres détenus en plaine propriété, mais également ceux détenus en nue-propriété ;
elle rétablit plusieurs exclusions particulières relatives à des sociétés distributrices bénéficiant d’une exonération d’IS après que le Conseil constitutionnel a déclaré non conformes à la Constitution, sur le fondement de l’incompétence négative, des dispositions de l’article 72 de la 2nde loi de finances rectificative pour 2014 (146) qui substituaient à ces exclusions particulières une exclusion générale de l’exonération des dividendes prélevés sur des bénéfices non soumis à l’IS ;
elle introduit :
une clause de sauvegarde permettant de maintenir l’exonération des dividendes provenant d’une société située dans un ETNC lorsque la preuve qu’il n’y a pas de volonté délibérée de fraude fiscale est apportée,
la clause anti-abus prévue par la directive (UE) 2015/121 du Conseil du 27 janvier 2015 : le régime mère fille ne s’applique plus aux dividendes distribués dans le cadre d’un montage ou d’une série de montages qui, ayant été mis en place pour obtenir, à titre d’objectif principal ou au titre d’un des objectifs principaux, un avantage fiscal allant à l’encontre de l’objet ou de la finalité du dispositif, n’est pas authentique compte tenu de l’ensemble des faits et circonstances pertinents, c'est-à-dire n’est pas mis en place pour des motifs commerciaux valables qui reflètent la réalité économique.
Ces mesures s'appliquent aux exercices clos à compter du 31 décembre 2016, sauf en ce qui concerne la clause anti-abus qui ne s'applique qu'aux exercices ouverts à compter du 1er janvier 2016.
Neutralisation de la quote-part de frais et charges (intégration fiscale)
La loi supprime la neutralisation de la quote-part de frais et charges afférentes aux dividendes versés entre sociétés d’un même groupe intégré.
Corrélativement, elle abaisse à 1 % le taux de la quote-part de frais et charges afférente aux dividendes éligibles au régime mère-fille que perçoivent les sociétés membres d’un groupe intégré d’autres membres du groupe ou de sociétés établies dans un autre État de l’Union ou de l’Espace économique européen.
Note
Cette mesure a pour objet de mettre le régime des groupes fiscaux en conformité avec le droit européen, en tirant les conséquences de la condamnation, par la CJUE , pour atteinte au principe de liberté d’établissement, de la restriction aux entités établies en France, de la possibilité de neutraliser, pour les dividendes versés entre membres d’un même groupe fiscal, la quote-part de frais et charges (QPFC) du régime mère-fille fixée 5 % du montant des dividendes, sans le permettre pour les dividendes provenant de filiales situées dans un autre État membre de l’Union européenne (qui, si elles avaient été résidentes de France, auraient pu être membres du groupe)..
Exonération de retenue à la source
S'agissant de l’exonération de retenue à la source des dividendes versés par une société française à une société mère européennes, la loi apporte 3 assouplissements et renforce la sécurité du dispositif en intégrant une clause anti-abus :
la 1ère mesure d'assouplissement, consiste en une extension géographique du dispositif : l’exonération de retenue à la source jusqu'alors prévue en faveur des sociétés mères dont le siège de direction effective est situé dans un Etat membre de l'Union européenne est étendu aux sociétés mères dont le siège est situé dans un Etat membre de l’Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales. Concrètement, cela étend le champ d'application de la mesure à 3 Etats membres de l’Association européenne de libre-échange (AELE) : l’Islande, la Norvège et le Liechtenstein ;
la 2ème abaisse le taux de détention du capital requis pour l’application de l’exonération de retenue à la source sur les dividendes versés à une société ou organisme européen de 25 % jusqu'alors à :
10 % en principe,
5 % lorsque la société mère européenne est privée de la possibilité d’imputer localement la retenue à la source (jusqu'alors, l’exonération de retenue à la source pour les dividendes distribués à une société d’un autre État membre était possible dès lors que la société mère détenait au moins 10 % des titres ; Toutefois, en pratique, la doctrine administrative prévoyait que, lorsqu’une société européenne bénéficiait de dividendes de source française afférents à une participation au moins égale à 5 %, la restitution de la retenue à la source peut être demandée dans des conditions exposées au Bulletin officiel des finances publiques) ;
la dernière mesure d'assouplissement prévoit de retenir, pour l'appréciation de ce pourcentage de détention, non plus seulement les titres détenus en pleine propriété, mais également ceux détenus en nue-propriété (en revanche les titres détenus en usufruit sont toujours exclus) ;
enfin, la loi encadre ce dispositif en transposant la nouvelle clause anti-abus prévue par la directive (UE) 2015/121 du Conseil du 27 janvier 2015 : l'exonération de retenue à la source ne s’applique plus aux dividendes distribués dans le cadre d’un montage ou d’une série de montages qui, ayant été mis en place pour obtenir, à titre d’objectif principal ou au titre d’un des objectifs principaux, un avantage fiscal allant à l’encontre de l’objet ou de la finalité de cette exonération, n’est pas authentique compte tenu de l’ensemble des faits et circonstances pertinents, c'est-à-dire n’est pas mis en place pour des motifs commerciaux valables qui reflètent la réalité économique.
Pour en savoir plus...
Réductions et crédits d'impôt en faveur des entreprises
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