En principe, le transfert du domicile fiscal hors de France, rend immédiatement exigible l’impôt sur les plus-values latentes sur les participations significatives, les créances trouvant leur origine dans une clause de complément de prix et certaines plus-values en report d'imposition (exit tax). Toutefois, le contribuable peut bénéficier d’un sursis de paiement, soit de plein droit, soit sur option.
Sursis d'imposition
Conditions du sursis
Les contribuables peuvent bénéficier d'un sursis à cette imposition dont les conditions diffèrent selon le pays d'expatriation :
le sursis s'applique de plein droit (sans aucune démarche, autre que la déclaration du gain, ni constitution de garantie) lorsque le contribuable transfère son domicile fiscal hors de France dans un Etat membre de l'Union européenne, ou dans un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales ainsi qu'une convention d'assistance mutuelle en matière de recouvrement ;
s'il transfère son domicile dans un Etat autre que ceux visés ci-dessus, le contribuable ne peut bénéficier du sursis d'imposition que sur demande expresse de sa part et sous réserve :
de la déclaration du montant des plus-values latentes (sur l'imprimé n° 2074-ET à déposer dans les 30 jours précédant le transfert, sur lequel sera formulée la demande de sursis),
de la désignation d'un représentant en France autorisé à recevoir les communications relatives à l'assiette, au recouvrement et au contentieux de l'impôt (cette obligation n'est toutefois pas exigée en cas de transfert du domicile au Liechtenstein),
et de la constitution, auprès du comptable public compétent, préalablement à son départ, sauf si le transfert de domicile a lieu pour raisons professionnelles, de garanties propres à assurer le recouvrement de la créance du Trésor (voir ci-dessous).
En pratique, la demande de sursis de paiement
est formulée sur la déclaration spécifique n° 2074-ET déposée au service
des impôts des particuliers non résidents dans les 30 jours précédant
le transfert du domicile fiscal hors de France ou de l’un des États
membres de l’UE ou parties à l’accord sur l’EEE.
Le sursis de paiement peut être demandé
distinctement pour l'impôt afférent à l'ensemble des plus-values
latentes, pour l'impôt afférent à l'ensemble des créances trouvant
leur origine dans une clause de complément de prix et pour l'impôt
afférent à l'ensemble des plus-values placées précédemment en report
d'imposition.
Cas particuliers
Transfert de domicile pour des raisons professionnelles
Lorsque le contribuable transfère son
domicile fiscal dans un Etat ou territoire qui n'est pas
partie à l'accord sur l'Espace économique européen, mais qui
a conclu avec la France une convention
d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude
et l'évasion fiscales ainsi qu'une convention
d'assistance mutuelle en matière de recouvrement et qu'il justifie
que ce transfert obéit à des raisons professionnelles, aucune garantie
n'est exigée pour l'application du sursis de paiement.
Les raisons professionnelles peuvent concerner le contribuable, son
conjoint ou son partenaire lié par un PACS.
Transferts de domicile successifs
Plusieurs cas peuvent se présenter :
après avoir transféré son domicile fiscal dans un Etat de l'UE ou de l'EEE (avec sursis de paiement de plein droit), le contribuable transfère à nouveau son domicile :
dans un autre Etat de l'UE ou de l'EEE éligible au sursis de plein droit : le sursis se poursuit,
dans un autre Etat : le sursis de plein droit prend fin et le contribuable doit alors respecter la procédure de suris sur option : il doit donc en faire la demande expresse dans les 30 jours précédant le transfert avec constitution de garanties et désignation d'un représentant fiscal en France ;
après avoir transféré son domicile fiscal dans un Etat autre que l'UE ou l'EEE (ne permettant pas de bénéficier du sursis de plein droit), le contribuable transfère à nouveau son domicile, mais cette fois dans un Etat éligible au sursis de plein droit :
s'il a bénéficié du sursis sur option lors du 1er transfert : le sursis de paiement de droit se substitue au sursis de paiement sur option. Il est mis fin à l'obligation d'avoir un représentant fiscal et, sur demande du contribuable, les garanties sont levées. Dans cette situation, le contribuable peut prétendre au remboursement des frais de constitution de garantie qu'il a supportés ;
s'il n'a pas bénéficié du sursis sur option lors du 1er transfert (le paiement de l'impôt a donc été effectué l'année suivant le transfert initial du domicile fiscal), il peut demander la restitution de l'impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux lorsque les titres demeurent dans son patrimoine à la date du 2nd transfert. Cependant, le contribuable reste redevable de l'impôt afférent à l'ensemble des plus-values latentes et bénéficie du sursis de paiement de droit pour cet impôt.
Constitutions de garanties
Les contribuables demandant à bénéficier du sursis de paiement sur option doivent présenter spontanément, sur papier libre, au SIP des non-résidents (dans les 30 jours précédant le transfert de domicile fiscal), des garanties pour un montant égal à :
12,8 % du montant total brut des plus-values et créances (sans qu'il soit fait application des abattements pour durée de détention ou fixe pour les dirigeants) pour les transferts intervenant à compter de 2018,
30 % de ce montant pour les transferts intervenus entre 2013 et 2017 (afin de garantir le recouvrement de la créance).
Cas particulier
Le montant des garanties à constituer pour les plus-values en report d'imposition obligatoire n'est pas fixé à 12,8 % ou 30 % du montant des plus-values en question, mais au taux moyen d'imposition qu'aurait supporté ce gain l'année de réalisation de l'opération d'apport ayant motivé le report.
Cette condition n'est toutefois pas exigée lorsque le transfert de domicile est motivée par des raisons professionnelles (cf ci-dessus).
Ainsi, ces garanties peuvent être constituées par un versement en espèces effectué à un compte d’attente au Trésor, par des créances sur le Trésor, par la présentation d'une caution, par des valeurs mobilières, des marchandises déposées dans les magasins agréés par l'État et faisant l’objet de warrant endossé à l’ordre du Trésor, par des affectations hypothécaires ou par des nantissements de fonds de commerce...
En cas de défaut de garanties ou de garanties insuffisantes, le comptable chargé du recouvrement peut refuser le sursis de paiement.
Il dispose d'un délai de 45 jours à compter du dépôt de l’offre pour se prononcer (par pli recommandé avec demande d’avis de réception). À défaut de réponse dans ce délai, les garanties sont réputées acceptées .
En cas de refus, le contribuable dispose de 15 jours à compter de la réception de la lettre recommandée, pour contester la décision, par simple demande écrite, devant le juge du référé administratif .
Par ailleurs, le comptable peut à tout moment, en cas de dépréciation ou d’insuffisance des garanties constituées, demander au représentant fiscal du contribuable, par lettre recommandée avec avis de réception, un complément de garantie en vue d’assurer le recouvrement de la somme contestée.
Note
Les contribuables qui ont transféré leur domicile fiscal hors de France entre le 28 septembre et le 31 décembre 2012 ayant demandé à bénéficier du sursis de paiement ont dû constituer, avant le 31 mars 2013, un complément de garantie pour assurer le recouvrement de l'impôt calculé au taux de 24 % en application de la loi de finances pour 2013 à hauteur de la différence entre ce montant d'impôt et le montant de la garantie constituée pour assurer le recouvrement de l'impôt calculé initialement au taux de 19 %. Ce complément de garantie devait être accompagné du dépôt, toujours avant le 31 mars 2013, d'un imprimé 2074-ET-R prenant en compte la modification du taux d'imposition à 24 %.
Conséquences du sursis de paiement
Le sursis de paiement a pour effet de suspendre l'exigibilité de l'impôt afférent aux plus-values latentes imposables à raison du transfert du domicile fiscal du contribuable hors de France, ainsi que la prescription de l'action en recouvrement jusqu'à la date de l'événement entraînant son expiration.
La majoration de 10 % appliquée lorsque l’impôt est placé en sursis de paiement de droit ou sur option est remise automatiquement par le comptable public lorsque l'impôt dû suite à l'expiration du sursis de paiement est acquitté.
Expiration du sursis
Le sursis de paiement expire au moment où intervient l'un des événements suivants :
la cession (il s'agit des transmissions à titre onéreux, à l'exception des opérations d'échange et d'apport des titres à une société contrôlée par l'apporteur ouvrant droit à report d'imposition ), le rachat, le remboursement ou l'annulation des titres,
pour les contribuables ayant transféré leur domicile hors UE ou EEE, la donation des titres pour lesquels des plus-values latentes ont été constatées dans le cadre de ce dispositif d'exit tax, sauf si le donateur démontre que la donation n'est pas faite à seule fin d'éluder l'exit tax (une donation réalisée à l'étranger en vue d'éluder un autre impôt que l'exit tax, par exemple les droits de mutation à titre gratuit qui auraient été applicables si elle avait été réalisée en France, ne doit par ailleurs pas purger la plus-value latente) ; pour les contribuables ayant transféré leur domicile dans un Etat de l'UE ou de l'EEE (cad ayant bénéficié du sursis d'imposition de plein droit), la donation entraîne le dégrèvement de l'impôt, sans qu'il soit nécessaire de prouver que la donation a un but autre que fiscal ;
le décès du contribuable, pour les plus-values en report d'imposition non purgées par les mutations à titre gratuit (en revanche pour les plus-values latentes et les compléments de prix, le décès entrainne le dégrèvement de l'impôt),
la perception du complément de prix, l'apport ou la cession de la créance le représentant,
pour les plus-values en report en cas de remploi à compter de 2013, à l'expiration du délai de réinvestissement de 24 mois, l'impôt devient exigible, et le sursis prend fin, pour la partie du gain non réinvestie.
Lorsque l'évènement mettant fin au sursis de paiement porte
sur une partie seulement des titres concernés, seule
la fraction correspondante de l'impôt afférent à la plus-value
latente en sursis de paiement est exigible, le surplus continuant
de bénéficier du sursis.
Afin de déterminer la fraction de l'impôt afférent à la plus-value
latente pour laquelle le sursis expire et celle restant en sursis
de paiement, lorsque les titres ou droits cédés sont fongibles
ou non individualisables, il convient de retenir pour le calcul
du prix ou de la valeur d'acquisition la valeur moyenne pondérée d’acquisition.
De la même façon, en cas de cession ou de donation des droits d'usufruit ou de nue-propriété des titres, le sursis de paiement expire pour la seule fraction de l'impôt afférent aux plus-values latentes se rapportant à l'usufruit ou à la nue-propriété des titres qui fait l'objet de la cession ou de la donation.
Cas particulier - Gains bénéficiant du report d'imposition en cas de remploi (avant 2014)
La réalisation d'une cession (avant 2014) bénéficiant du report d'imposition en cas de remploi du produit de la cession dans une autre entreprise ne remet pas en cause le sursis d'imposition accordé au contribuable le cas échéant lors du transfert du domicile hors de France.
En revanche, la transmission, le rachat ou l'annulation, avant le délai de 5 ans, des titres ou droits acquis, pour pouvoir bénéficier du report d'imposition de la plus-value, en remploi du produit de cession entraîne l'expiration du sursis.
Conséquences de l'expiration du sursis de paiement
La levée des garanties correspondant aux impositions pour lesquelles le sursis de paiement a expiré est prononcée consécutivement au paiement effectif de ces mêmes impositions.
Pour en savoir plus...
Régularisation (Dégrèvement, restitution ou modulation)
Comment souscrire la déclaration n° 2074-ETD ?